Interview Sylvie Knoerr et Francis Kaigre
Civils, irréductiblement - Service civil et refus de servir. 1964-1969, etc.
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La Rédaction de La Raison publie avec plaisir la présentation du livre « Civils, irréductiblement - Service civil et refus de servir. 1964-1969, etc. » que Sylvie Knoerr et Francis Kaigre ont bien voulu nous accorder.

La Raison : Bonjour Sylvie, Bonjour Francis. Pouvez-vous vous présenter en quelques mots pour nos lecteurs ?
LPA : Notre association, la Libre Pensée autonome, s’est désaffiliée de la Fédération nationale des libres penseurs en 1973. À l’origine, le refus d’une contradiction trop forte entre les principes énoncés et le fonctionnement réel du mouvement. Depuis, libres des contraintes « Institutionnelles » qui sont le propre des fédérations - quelles qu’elles soient -(congrès, motions, etc.), nous diffusons les idées qui nous sont chères, liberté de pensée et d’expression, droit des individus à disposer d’eux-mêmes, pacifisme, non-violence, et bien d’autres, au travers de deux sites web : Penser libre et Les Archives André Arru. Peu après le décès de notre ami, animateur depuis de longues années de notre mouvement, nous avons ajouté « Les amis d’André Arru » au titre initial.

En plus de causeries-débats, de la participation à diverses manifestations, la Libre Pensée autonome-Les amis d’André Arru contribue à l’édition d’ouvrages, par l’implication pratique de certains de ses adhérents et par une aide financière. Ainsi, au départ, est parue en 1994, en co-édition avec le CIRA (Centre inter¬national de recherches sur l’anarchie) la biographie d’André Arru 1. Plus récemment, en janvier 2018, « Civils, irréductiblement - Service civil et refus de servir 1964¬1969, etc. » avec les Éditions libertaires, dans la Collection « Désobéissances libertaires ». 2

LR Pouvez-vous nous parler plus en détail de ce dernier ouvrage, dont vous faites la promotion ?
LPA : De quoi s’agit-il ? En mai 1997, le Président Chirac suspendait le service national. Depuis, régulièrement, des voix d’un bord comme de l’autre de l’échiquier politique demandent le retour d’un service national, militaire ou civique, obligatoire ou non. Il ne faudra pas oublier que, de toute façon, un rendez-vous « citoyen » est imposé aux jeunes français, garçons et filles, et que le refus de ces journées leur interdit l’accès aux universités et à la Fonction publique, le permis de conduire, la présentation à des examens. Lorsque le statut de l’objection de conscience fut voté en décembre 1963, en fait rien n’avait été prévu, pensé, organisé. Les objecteurs, qui enfin n’étaient plus incarcérés, se sont retrouvés sous la coupe de militaires, qui entendaient bien les traiter comme n’importe lesquels des appelés et non comme des civils. Mais il y eut résistance, d’où ce titre « Civils, irréductiblement ». Le livre signé Jo Rutebesc (anagramme d’objecteurs) retrace ces luttes à partir de nombreux documents : les publications assurées dans des conditions artisanales et souvent précaires par les objecteurs eux-mêmes, ainsi que divers témoignages d’hier et d’aujourd’hui.

LR D’après vous quel est l’intérêt pour les plus jeunes d’entre nous d’un livre sur ce sujet ?
LPA  : Il pourrait paraître inutile de revenir sur ces années, qui semblent lointaines à beaucoup. Mais il était nécessaire, à notre idée, de garder trace de cette époque, d’abord parce que l’Histoire faite par les puissants ne s’en chargera pas, bien sûr. Ensuite, parce qu’il s’agit d’un bel exemple de lutte pacifiste, de convictions bien ancrées : non seulement refus de tuer, de porter les armes, mais aussi refus de servir sans réfléchir, refus de laisser au vestiaire sa propre responsabilité d’Etre humain. Enfin, comme il est dit plus haut, le service national n’est que suspendu. Si l’armée est désormais professionnelle et peut ne plus vouloir encadrer de jeunes recrues, un service national peut servir de volant de manœuvre pour casser des grèves, remplacer des agents de service public, et qui sait quoi d’autre...

Les plus jeunes auront peut-être entendu des pères ou grands-pères donner l’image d’un service « bon enfant », plus ridicule que meurtrier, petite aventure en somme, au cours de laquelle ils rencontraient des jeunes d’autres régions, d’autres milieux sociaux, et devenaient « des hommes »... C’est-à-dire, boisson, tabac, prostituées, sans parler des missions sanguinaires : l’Indochine, puis l’Algérie. Une méthode de gouvernement consiste à gommer l’histoire des luttes et des résistances au pouvoir en place. C’est contre cette tendance que nous voulons, à quelques-uns, travailler, ce qui n’exclut pas évidemment de s’investir dans les luttes actuelles, au contraire.

Propos recueillis par Henri Huille

Notes
1 Jean-René Saulière dit André Arru, un individualiste solidaire (1911-1999) / par Sylvie Knoerr-Saulière et Francis Kaigre, Ed. Les Amis d’André Arru-Libre pensée autonome & Centre international de recherches sur l’anarchisme, Marseille, 2004. 440 p. 2« Service civil et refus de servir. 1964-1969, etc. » par Jo Rutebesc, Les Editions libertaires et La Libre Pensée autonome-Les Amis d’André Arru, Collection « Désobéissances libertaires », janvier 2018, 400 p.

Jo Rutebesc




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