Le Mouvement Non-Violent Syrien "Visions Du Terrain "
Article mis en ligne le 2 septembre 2023

Une étude de Mohamed Dibo et du groupe de recherches Dawlaty.

Ce rapport fournit une vue générale des réflexions des activistes syriens sur la réalité de leur mouvement, son rôle, et leur potentiel de reprendre le flambeau. Son but est de stimuler les débats afin de pouvoir changer la réalité sur le terrain à travers des discussions et des recommandations, et d’inspirer de nouvelles opportunités pour les mouvements de non-violence en Syrie.

Source www.dawlaty.org-

La révolution syrienne souffre aujourd’hui de plusieurs maux, du déclin du mouvement civil non violent, qui avait été sa force civilisatrice, à la réalité militaire complexe et en constante évolution, en passant par les acteurs internationaux et régionaux qui sont devenus plus influents et plus actifs en Syrie que les Syriens eux-mêmes. Pourtant, malgré cette sombre réalité, il reste un certain nombre de militants syriens qui travaillent dans l’ombre et sous les yeux du public, dans leur pays et à l’étranger, chacun selon ses capacités et selon les marges, même étroites, qui lui permettent d’entretenir la flamme de la révolution. Ces activistes explorent à nouveau leurs outils et leur rôle dans une série de discussions et de dialogues animés par Dawlaty.

Ce rapport donne un aperçu des réflexions des activistes syriens sur la réalité de leur mouvement, ainsi que sur le rôle, le potentiel et la capacité du mouvement à reprendre la tête du mouvement. Ce rapport documente un processus réalisé par et pour des militants, d’où sa valeur et son importance. Il vise à stimuler le débat et la réflexion critique à la lumière des réalités changeantes sur le terrain et, par ses discussions et ses recommandations, à inspirer des stratégies visant à ouvrir de nouveaux espaces et de nouvelles opportunités pour le mouvement non-violent en Syrie.

Un mouvement déchiré et dispersé à travers une géographie déconnectée, parmi des forces diverses avec des agendas différents, fait face à une réalité extrêmement difficile aujourd’hui. Cela se reflète dans les discussions des activistes qui ont eu des débats animés et des échanges sur de nombreuses questions, allant de la définition du mouvement civil syrien et de la question de savoir s’il inclut ou non le travail d’assistance, au rôle de la militarisation, en passant par le rôle actuel du mouvement et les possibilités de restaurer le rôle positif dont il jouissait au début de la révolution.

Méthodologie

Pendant six mois, au cours du premier semestre 2013, Dawlaty a fait appel à 129 activistes syriens non violents de toute la Syrie et des pays voisins pour recueillir leurs points de vue sur les trois premières années du mouvement non violent, ses forces, ses inconvénients, les leçons apprises et son rôle futur possible dans le contexte syrien. 72 militants ont participé à des discussions de groupe qui ont eu lieu en Syrie (Alep rural), au Liban et en Turquie, tandis que 66 militants ont participé à des entretiens individuels et à des questionnaires en ligne. Les différentes méthodes d’engagement ont permis à Dawlaty d’atteindre des participants de toute la Syrie. Cependant, l’équipe a eu du mal à faire participer les femmes à l’étude, car seulement 30 % des personnes interrogées étaient des militantes. Ce problème s’est particulièrement posé dans le nord de la Syrie et en Turquie (où les participants avaient voyagé depuis le nord de la Syrie).

Après avoir consolidé les résultats préliminaires de l’enquête, Dawlaty a organisé un atelier à Beyrouth réunissant des activistes syriens de différentes régions de Syrie, ainsi que des activistes déplacés de Turquie et du Liban, afin d’interpréter les résultats et d’approfondir l’analyse. En outre, un chercheur a été recruté pour consolider les résultats et l’analyse dans un rapport et mener des entretiens de suivi sur différents sujets. Le présent rapport vise à documenter et à interpréter les résultats des discussions et à identifier les domaines dans lesquels les activistes syriens devraient poursuivre leurs discussions et leurs délibérations, dans l’espoir d’approfondir la réflexion du mouvement non-violent sur son rôle et ses tactiques.

Résultats de l’étude

Cette étude a révélé l’absence de développement de la pensée, de la culture et des activités d’un mouvement non violent en Syrie avant la révolution, ainsi que la suppression des tentatives de création d’une société civile syrienne, ce qui l’a affaiblie. Cette absence a pesé sur le mouvement non-violent syrien au début de la révolution, alors que les activistes apprenaient de leurs expériences quotidiennes, accumulant une expertise grâce à leurs contacts avec le monde extérieur, les organisations internationales et la presse. Cette épreuve du feu leur a permis de former un mouvement dont ils sont fiers aujourd’hui et qu’ils considèrent avec bienveillance, en particulier dans ses premières phases pacifiques. Ils ont pu briser le monopole du régime sur l’espace public, entrer dans la sphère de l’action et se présenter au monde, libérés de l’hégémonie d’une autorité qui avait, pendant des décennies, dominé leurs voix et leurs actions.
Malgré la faiblesse de la société civile avant la révolution, cette étude a révélé à quel point la société civile syrienne s’est développée ces dernières années, devenant plus institutionnelle et plus expérimentée. Cependant, le développement de la société civile et de ses institutions a coïncidé avec le déclin du mouvement civil. Cela est dû à la violence déclenchée contre lui par le régime, à la militarisation, qui a réduit les espaces civils d’activité et de mobilité, et à la rupture de la géographie syrienne. Il semble que les deux extrémités de l’équation que les activistes attendaient de voir connectées ne l’aient finalement pas été. Alors que le mouvement civil non violent s’est formé au début de la révolution sans une société civile mature pour l’accueillir et le nourrir, nous sommes aujourd’hui confrontés à une société civile relativement forte, bien qu’atypique et peu structurée, et à un mouvement civil faible.

La situation actuelle peut encore être interprétée de manière positive, car la société civile croissante est un facteur positif pour le mouvement civil aujourd’hui et à l’avenir. Nous sommes actuellement confrontés à des militants, des forces et des institutions plus conscients de la signification du mouvement, de son rôle, de sa stratégie ainsi que de ses succès et de ses erreurs.

Plus important encore, cette expérience a été façonnée en fonction des expériences vécues par les militants qui, malgré toutes les sombres réalités, cherchent des poches d’espoir pour activer, développer et revigorer le rôle du mouvement. Cela s’est reflété dans les débats importants qui ont eu lieu lors des sessions de discussion réunissant les militants.

Les discussions ont rappelé aux activistes qu’ils n’avaient pas pu se rencontrer depuis un certain temps, ce qui s’est traduit par une différence d’opinions, et donc de mouvement civil, entre une région et l’autre. La situation du mouvement a été analysée en fonction des zones contrôlées par le régime, l’Armée syrienne libre (ASL), le Front islamique (FI), l’État islamique en Irak et en Syrie (ISIS), le Front al-Nusra (FN) et l’Union démocratique kurde (UDK). Les domaines de divergence et de contiguïté entre les expériences des militants dans chaque région ont été discernés, ainsi que la meilleure façon de coopérer pour activer leur rôle. Les militants ont estimé que chaque région devait avoir son propre mouvement, en fonction de son expérience autochtone, de la situation de ses militants, de la nature des forces militaires qui la contrôlent, ainsi que du type et de la gravité de la violence à laquelle elle est confrontée. Travailler avec des mouvements dans chaque région séparément, sans les relier au reste de la géographie syrienne et sans avoir de stratégie pour l’activation d’un mouvement au niveau national constitue une menace. Cette régionalisation accroît la disparité entre les demandes et les préoccupations d’une région à l’autre, comme le montre, par exemple, la modestie des demandes des activistes des régions dominées par le régime par rapport à celles des activistes d’autres régions.

Il est nécessaire d’élaborer une stratégie au niveau national, une stratégie qui, nous l’espérons, sera élaborée à la suite de ces discussions et de la compréhension acquise par les militants eux-mêmes après avoir réfléchi à leur expérience. Au cours des discussions, les militants ont souligné la nécessité de donner à l’organisation, à la stratégie et aux mécanismes de protection un rôle plus important dans l’organisation. En outre, il a été reconnu qu’une lutte pacifique n’est pas liée à une durée spécifique. Les militants ont évoqué la nécessité pour le mouvement de disposer de ses propres médias et d’examiner attentivement les sources de financement et les donateurs. Ces conclusions reflètent essentiellement l’évolution de la vision des activistes et l’accumulation de leur expérience. La discussion sur les différents sujets s’est déroulée sans recours à des absolus, les militants étant prêts à aborder les aspects positifs et négatifs de toutes les questions.

Sur la base de tout ce qui précède, la vision des activistes sur la réactivation du mouvement peut être résumée par la nécessité de trouver une nouvelle stratégie, reflétant ainsi la nécessité de développer une vision politique pour le mouvement. Il est nécessaire de rechercher des tactiques alternatives et d’atténuer les effets des violations des droits de l’homme et de la prévalence des armes dans la société syrienne. Dans le même temps, il est nécessaire de combler le fossé entre le travail de la société civile axé sur le civisme et celui axé sur le service, en impliquant les deux dans le mouvement et en créant un environnement stimulant pour les activistes exilés qui retournent en Syrie. Il est également urgent de promouvoir en permanence les objectifs de la révolution afin de la soutenir. Enfin et surtout, il faut faire davantage pour réactiver le rôle des femmes dans le mouvement, qui a été considérablement marginalisé en raison de l’omniprésence des armes.

Conclusions complémentaires :

● Le mouvement pacifique syrien ne se porte pas bien aujourd’hui. Il souffre de faiblesse, de fragmentation et de rupture en raison de la rupture géographique de la Syrie elle-même ; ce qui se reflète négativement à la fois sur le mouvement et sur les activistes.

● Les militants sont tout à fait conscients de l’affaiblissement du mouvement et de la nécessité de surmonter cette faiblesse. La sombre réalité ne les a pas dissuadés d’exprimer l’importance pour ce mouvement de retrouver son rôle. Cela est dû à leur conscience que la fin de leur rôle signifie la fin de leur Révolution. Ils n’ont pas abandonné ce rêve - pas encore.

● Les activistes réalisent clairement la faiblesse du mouvement non-violent et la nécessité de remédier à ces faiblesses. Cependant, ils n’ont pas de stratégie pour surmonter ces faiblesses, c’est pourquoi nous suggérons que les militants soient formés sur la façon de construire une telle stratégie.

● Les militants sont bien conscients des tragédies engendrées par la militarisation et la guerre en cours, notamment de la manière dont elle a conduit à leur marginalisation dans certains cas et à ce qu’ils soient dépassés dans leurs efforts pour en contenir les effets dans d’autres cas. Enfin, ils se rendent également compte de la nécessité de surmonter cette attrition pour retourner travailler sur le terrain pour leur mouvement.

● Les militants se rendent compte que la militarisation est devenue une réalité de fait, qu’ils soient d’accord ou non ; et ils sont effectivement en désaccord avec elle. Une vision unifiée sur la manière de traiter les groupes armés est donc devenue incontournable. Il n’est plus possible d’attendre la "chute du régime" ou de mettre fin à la "militarisation" : Il faudra de nouveaux mécanismes d’action issus de la réalité actuelle, en utilisant les marges d’action existantes.

● Le rôle des femmes a été marginalisé dans le mouvement actuel en raison de la prédominance de la militarisation, des armes, d’une mentalité masculine et de l’acceptation par les femmes elles-mêmes des rôles stéréotypés qui leur sont accordés. Cependant, toutes les personnes impliquées (hommes et femmes) sont d’accord sur la nécessité d’activer ce rôle, un courant de pensée stipulant qu’il existe aujourd’hui des rôles spécifiques qui ne peuvent être joués que par des femmes. Ceci est très important pour comprendre le besoin de changement et l’importance du travail des femmes. Malgré la difficulté de mise en œuvre sur le terrain, les activistes travaillent actuellement à la recherche de mécanismes permettant de surmonter cet obstacle.

Recommandations pour les militants :

La première mesure à prendre par les groupes de la société civile pourrait consister en une initiative élaborée en coopération avec la plupart des militants. Cette initiative peut prendre la forme d’un rassemblement décentralisé, permettant de se mettre d’accord sur une stratégie globale avec des différences de tactique pour prendre en compte les spécificités de chaque zone dans laquelle les groupes travaillent. Ces réunions permettraient l’élaboration d’un pacte civique national jetant les bases d’un nouveau mouvement civil, en tenant compte de la nécessité de développer des solutions, des mécanismes de travail ainsi que des réponses au dilemme mentionné ci-dessus, à savoir :

● Une séparation claire entre l’extrémisme et la Révolution. Au cours de la Révolution, il y avait eu des activistes qui, parfois, travaillaient avec le FN, tandis que d’autres travaillaient avec des brigades islamiques, qui hissaient le logo de l’État islamique. Ces actions ont placé le mouvement dans une position peu enviable en termes de perte de promotion médiatique, d’autant plus que les FN ont été placés sur des listes terroristes internationales. Cela nécessite une séparation claire entre l’extrémisme et la Révolution d’une part, et entre ceux qui brandissent le slogan de l’Etat civil et ceux qui brandissent le logo de l’Etat islamique, d’autre part. Cette séparation claire et précise devrait aider à classer tous ceux qui appellent à un État civil comme faisant partie du mouvement, et comme partenaires ; tout en isolant les autres ou du moins en ne travaillant pas avec eux.

● S’efforcer de trouver une vision claire de la manière de traiter les groupes armés. Le conflit armé est aujourd’hui devenu une réalité incontournable, et les militants doivent y faire face. Cela peut se faire en trouvant une formule permettant de travailler avec les militants qui ne sont pas impliqués dans des crimes de guerre et qui affichent leur foi en l’État démocratique. Il est également nécessaire d’élaborer une stratégie à long terme pour placer l’armée sous l’autorité des conseils locaux - ou de toute partie civile officielle - qui peuvent alors former un lien entre l’armée et les activistes civils dans une zone donnée. Les groupes doivent avoir la possibilité de développer des mécanismes et une formule de coopération avec les insurgés en fonction des circonstances de chaque région, à condition que cette formule garantisse que l’activisme civil reste en mesure de prendre ses propres décisions et de mener ses activités sans crainte d’aucune autre partie.

● Travailler à la création d’une charte nationale des médias, rejetant la cooptation par l’armée et s’efforçant de dire la vérité telle qu’elle est, sans amplification ni dépréciation des événements.

● Travailler à la recherche d’un lien stratégique, approfondi et pratique entre les activistes à l’étranger et ceux restés en Syrie, afin qu’ils se complètent et mettent fin à leur dispersion actuelle, qui fait parfois apparaître leurs efforts comme sporadiques et réactionnaires. En outre, il faut travailler au retour définitif des activistes en Syrie, et non l’inverse.

● Travailler sur l’établissement de liens entre l’activisme civique et les communautés locales à domicile afin de développer leur sensibilisation à l’activisme civique. Ainsi, non seulement travailler avec eux dans les domaines de l’aide, de l’éducation et du soutien psychosocial, mais aussi travailler à restaurer la confiance de cet environnement d’accueil dans le travail civique.

● Répartir les objectifs du mouvement pacifique entre le stratégique et le tactique. Ainsi, l’objectif stratégique est de construire un État civil démocratique qui respecte tous ses citoyens et qui s’engage à faire de la Syrie un pays pour tous ses citoyens, sans distinction de religion, de croyance ou de race ; et qui rejette les armes, une fois que le besoin s’en fait sentir. La tactique, en revanche, est déterminée par ce qui peut être fait sur le terrain, en fonction des circonstances de chaque région ; en tenant compte du fait que la lutte civique et pacifique est une lutte à long terme, qui n’est pas liée à un moment ou à une durée spécifique, et dont les objectifs ne peuvent pas être atteints du jour au lendemain.

● Travailler à l’élaboration d’une stratégie visant à activer le mouvement pacifique dans les zones d’où ISIS, les FN, les bataillons extrémistes ou le régime sont évacués. Cela devrait faire partie d’un mécanisme qui prend en compte les expériences du passé, dans lequel chaque partie laisse à l’autre suffisamment d’espace pour travailler. par le biais d’une formation à trois volets : Ceux qui portent des armes pour protéger les civils et leurs zones ; les activistes et les organisations de la société civile pour activer le mouvement non violent ; et le conseil local pour gérer les affaires administratives. Ces trois parties seront soumises à un conseil supérieur - composé de représentants de toutes les parties susmentionnées - et seront seules responsables de la prise de décisions, jusqu’à ce que le nouvel État syrien soit en mesure de restaurer sa légitimité et sa capacité à imposer son autorité sur le terrain après la conclusion d’un accord politique. Il convient de garder à l’esprit que cette phase peut s’avérer prolongée ; ce qui signifie une volonté d’accomplir les tâches de l’État qui ont été affaiblies à l’heure actuelle, pendant une période plus longue.

● Malgré le fait que la situation syrienne actuelle soit fragmentée, complexe et ne se prête pas à la mise en place d’une activité singulière au niveau national de l’ensemble du pays, il semble essentiel que les activistes continuent à élaborer leurs plans au niveau national. Dans le cadre de la stratégie globale mentionnée ci-dessus, chaque région devrait prendre les mesures qu’elle juge appropriées, en fonction de sa situation. Ceci devrait être maintenu parallèlement à la nécessité d’une intégration avec l’ensemble de la géographie syrienne, permettant ainsi au mouvement de maintenir l’unité de la Syrie, tout en soulignant la particularité requise par chaque région.

Recommandations pour la société civile syrienne● Les organisations de la société civile et leurs travailleurs devraient s’efforcer de réduire le fossé entre les militants et les organisations internationales. Cela devrait commencer par l’explication du rôle de ces organisations et de leurs objectifs, en précisant qu’elles sont plus que de simples institutions de soutien distribuant de l’argent au hasard ; ce sont plutôt des organisations visant au développement des communautés et des individus - dans le cadre des compétences respectives de chaque organisation. L’accent devrait également être mis sur l’existence d’organisations ayant des agendas politiques particuliers ; ce qui signifie la nécessité d’un double type de travail : Le rôle des organisations, leur objectif, et la nature de leur travail, afin d’atténuer la vision négative qui prévaut chez certains militants de ces organisations, ainsi qu’un travail approprié pour vérifier l’objectif d’une organisation avant de travailler avec elle ; en lisant son histoire et son rôle pour trouver d’éventuels agendas cachés - s’il y en a - et former les militants sur la façon de le faire.

● Les organisations de la société civile devraient chercher à travailler dans leur pays plutôt qu’à l’étranger. Elles devraient transférer leur siège dans le pays lorsque l’occasion se présente ; car leur travail à l’étranger entraîne une perte partielle de leur crédibilité - en particulier lorsque les militants souffrant de siège et de fatigue sont témoins de la sécurité et du luxe dont jouit le personnel de ces organisations.

● Le personnel de ces organisations - en particulier les Syriens parmi eux - devrait fournir des informations et une expertise aux militants d’une manière non condescendante et non moralisatrice, qui s’appuie sur le dialogue et une définition claire des rôles. Elles devraient mettre l’accent sur le fait que le rôle de ces organisations est de fournir l’expertise que les militants devraient, à leur tour, transférer sur le terrain en se basant sur leur expérience - plutôt que de les traiter comme des recettes toutes faites.

● Intensifier la formation et les ateliers pour ceux qui se trouvent à l’intérieur du pays. Un mécanisme permettant de mesurer la manière dont ces exercices et ateliers se répercutent sur la sensibilisation des militants, d’une part, et sur le terrain, d’autre part, devrait être mis en place.

● Les organisations de la société civile devraient être transparentes quant à leurs finances et à leurs bailleurs de fonds, afin de permettre aux militants eux-mêmes de déterminer s’ils traiteront ou non avec ces organisations.

● Les organisations de la société civile devraient préciser de manière transparente aux militants participant à des ateliers que ces ateliers sont organisés à des fins de formation, et non pour gagner de l’argent. Il convient également d’expliquer, même si c’est de manière indirecte, que le personnel de ces organisations est rémunéré non pas parce qu’il s’agit de militants révolutionnaires, mais en raison de leurs expériences et de leurs qualifications. En d’autres termes, c’est leur expérience qui prime sur la révolution et non l’inverse - même si ces experts sont, à leur manière, des militants révolutionnaires

Recommandations aux organisations internationales et aux organismes donateurs :

● Veiller à ce que l’aide/le soutien soit accordé aux militants actifs sur le terrain, ou aux organisations ayant un lien effectif avec l’intérieur de la Syrie.

● Se concentrer d’abord sur le soutien des activistes à l’intérieur du pays.

● Se concentrer sur le soutien aux projets dans l’intérieur syrien, encourageant ainsi le retour des activistes dans le pays, en créant des mécanismes opérationnels avec les activistes.

● Soutenir des projets qui atténuent les inconvénients de la militarisation et de l’armement.

● Former les militants sur la façon de construire de nouvelles stratégies qui intègrent les leçons tirées des expériences et des erreurs précédentes. Il faut également insister sur la nécessité de prendre en compte les environnements opérationnels des militants ; ce qui signifie que ces stratégies doivent être créées avec les militants qui les mettront en œuvre, et ne sont pas simplement des solutions toutes faites à mettre en œuvre.

● Travailler à l’élargissement des rangs des travailleurs humanitaires, afin de ne pas épuiser les efforts des militants en matière de travail civique et de leur permettre de retrouver leur rôle.

● Travailler à l’établissement de liens entre les organisations de la société civile actives aujourd’hui et le mouvement, d’une part, et entre les militants à l’intérieur et à l’extérieur de la Syrie, d’autre part.

● Soutenir nombre de ces types de discussions et d’ateliers, car ils permettent aux militants de faire connaissance les uns avec les autres, d’une part, et de déterminer les erreurs commises par le biais d’un processus de réflexion et d’examen, d’autre part. Cela permettra de développer des idées et des solutions qui serviront à soutenir la communauté et le mouvement.